"Affaire de relations" dans les métiers du transport
- Temps d'écoute : 16 mn
- Être bien au travail, Interview
Dans le cadre de notre série de podcasts “Affaire de relations”, Virginie Martin reçoit Valérie Jimenez, Présidente du Groupe Jimenez. L’occasion d’aborder le métier du transport, ses problématiques et la manière dont l’entreprise les traite, mais aussi l’importance de la relation au sein de l’entreprise et la valeur du talent relationnel des collaborateurs. Cet entretien est disponible en lecture ou en mode audio (SoundCloud).
Déterminer son objectif pour un entretien, et oser dire les choses
Virginie Martin : Bonjour à tous, voici le second podcast de notre série Affaire de relations. C’est l’opportunité pour nous de parler de nos clients et avec nos clients, de leur activité et de l’importance que peut constituer le talent relationnel pour eux dans leur profession. Notre conviction, c’est que les relations d’affaires sont avant tout affaires de relations. Aujourd’hui, j’ai la chance et le plaisir d’échanger avec Valérie Jimenez, Présidente du Groupe Jimenez, acteur majeur du transport de marchandises et client d’Interactifs depuis 2019. Dans ce métier souvent considéré comme difficile, il est aussi affaires de relations et pas qu’affaire d’argent.
Bonjour Valérie, contente de te revoir. J’ai envie, pour commencer, qu’on revienne au début : quand as-tu pour la première fois croisé le chemin interactif ?
Valérie Jimenez : Bonjour Virginie. Moi aussi je suis très contente de te revoir. On se connaît depuis 2018 et j’ai eu la chance, par ton intermédiaire, d’être invitée à une formation qui, au départ, je pensais être une formation de communication. J’ai déjà participé à plusieurs formations de ce type. J’adore le développement personnel, j’adore apprendre et je me dis “bon, allez, on y va, on fonce”. Et là j’ai été séduite par le fait de communiquer avec bienveillance pour gagner du temps. Je retiens de cette formation que, communiquer, c’est une chose, mais arriver d’abord à bien cerner et trouver l’objectif que l’on veut pour l’entretien que l’on est en train de préparer, c’est l’essentiel. Et, de fait, cette formation m’a permis d’oser dire à l’une de mes collaboratrices – que j’adore mais qui ne correspondait plus au travail qu’on lui demandait à ce moment là : “écoute, je pense que nos chemins vont se séparer maintenant”. Arriver à trouver mon objectif pour cet échange m’a été très difficile.
VM : Parlons du groupe Jimenez. Quelques mots sur ton entreprise, son évolution et son actualité du moment ?
VJ : Je suis fille, petite fille, arrière-petite-fille de commerçants. Ca, c’est dans mon ADN de parler de commerce, de créer et d’être entrepreneur. Avec mon mari – qui lui était mécanicien – on s’est dit qu’on voulait monter quelque chose, soit une casse, soit un garage. On a eu l’opportunité de créer une entreprise de transport. On n’était que deux et à ce moment là, il fallait qu’on soit minimum trois pour être deux sur la route et moi venir en remplacement. On a proposé à mon beau-frère, qui à ce moment là était en plein divorce. On lui a dit : en fait, il faut tout quitter : le boulot, la maison, la femme. Il est venu travailler avec nous pendant plusieurs années, jusqu’en en 2016 où il a volé de ses propres ailes avec sa nouvelle femme. On a donc commencé à trois. Et maintenant nous approchons les 600 salariés.
On a aujourd’hui plusieurs projets. D’abord, de faire découvrir le transport. On en a besoin partout, on l’a bien vu pendant la période de confinement. On peut s’habiller, se nourrir, s’abriter, se soigner (médicaments, masques, etc.) car tout cela arrive par transport : transport routier, transport fluvial, transport aérien, transport maritime. Peu importe, ça arrive en tout cas au final par un camion. J’ai envie de montrer qu’on peut faire du transport avec bienveillance et embaucher des personnes qui ont envie de travailler. Parce que c’est aussi, en ce moment, notre objectif à tous : motiver les gens à revenir travailler et à redorer le mot ‘travail’ (parce qu’à l’origine “travail” vient de tripalium : éléments de torture !). On va appeler ça plutôt une activité : on peut avoir des activités de loisirs et des activités pour gagner de l’argent, pour pouvoir se payer des loisirs. Pour moi, c’est important de valoriser le transport, mais aussi le déménagement, puisque depuis maintenant pratiquement deux ans, on a démarré une activité de déménagement et une activité aussi d’aménagement cinéraire. On propose aux communes une alternative au colombarium traditionnel.
VM : Tu donnais l’exemple de l’utilité du transport pendant la période de confinement. On est encore dans la crise du Covid, il y en a d’autres qui arrivent. Quels sont les impacts pour vous des crises que nous traversons actuellement ? Et pas seulement en termes économiques. Parle-moi aussi des impacts dans les relations, au sein des équipes, avec tes collaborateurs, avec vos clients peut-être aussi.
VJ : Pour moi, ce que ça a changé, c’est surtout qu’on doit donner du sens. Et je suis la première, quand je fais quelque chose, à chercher à comprendre les raisons pour lesquelles on doit faire telle ou telle chose. C’est important de donner à nos collaborateurs et collaboratrices davantage de sens, pour qu’on puisse justement avoir envie de travailler en se disant qu’on sait pourquoi, et qu’on est utile à telle ou telle action. Ca, pour moi, c’est très important, notamment en ce moment, avec la guerre en Ukraine : on est venu en aide et on a acheminé de la marchandise des M.I.N. de Toulouse aux M.I.N. de Rungis. On n’est pas les seuls, on a été plusieurs transporteurs. Ce que j’aime, c’est fédérer les personnes. Via un groupe WhatsApp, on a fédéré plusieurs personnes pour la solidarité en Ukraine. Je crois que c’est ma valeur. C’est ce qui me fait vivre, c‘est d’aimer les gens, de les voir s’entendre bien, de faire se rencontrer des personnes. Et quand il y a un conflit, j’aime bien essayer de comprendre pourquoi un tel ne s’entend pas avec untel, et essayer de les faire se reparler.
Malentendu et mal exprimé, à la source des problèmes de relations
VM : Justement, quand en situation de conflit, on aimerait que les gens soient capables de se reparler, de renouer des liens, etc., on est sur le sujet de la relation. En particulier dans le contexte de crise qui exacerbe parfois les comportements, en quoi le talent relationnel est devenu important ? Pourquoi est-ce qu’il est apparu nécessaire d’investir en termes de formation pour tes équipes sur ce terrain là ?
VJ : Interactifs est très important à ce niveau là. Combien de fois ne dit-on pas qu’il y a un quiproquo lors de ces problèmes de communication… Et un quiproquo, c’est quoi ? C’est un malentendu, mais c’est aussi un mal exprimé. Il y a des moments où je sais mal m’exprimer. Parfois je ne sais pas écouter. Ma fille souvent me le dit : “Tu n’as pas écouté, écoute moi”. C’est important de considérer l’autre personne. Et dans mon entreprise, c’est important qu’on puisse communiquer les uns avec les autres. Et quelquefois, on a beau parler la même langue, on n’a pas le décodeur pour parler ensemble. Un service RH ne parle pas de la même manière que le service Exploitation ou le service Comptable. En tout cas, ils n’ont pas les mêmes besoins. Le point de départ, c’est donc d’apprendre à connaître les besoins des uns et des autres, et fonctionner aussi dans un mode “Vis ma vie” pour voir les contraintes ou les avantages de tel ou tel service.
VM : Et puis, pour témoigner du travail qu’on a fait avec tes équipes, connaître ce que fait l’autre, le besoin de l’autre, etc. mais c’est aussi apprendre à être capable de lui demander quelque chose plutôt que de lui faire un reproche. Ou être capable de poser les bonnes questions, d’écouter et de faire quelque chose de ce que l’autre te dit. Au fond, on apporte des outils au service de ces relations internes que tu souhaites plus efficaces, plus fluides et de meilleure qualité dans ton entreprise.
VJ : Oui, d’autant que la formation est sur plusieurs jours, il y a aussi eu d’autres formateurs, et quand on fait l’exercice en vidéo où vous nous filmez sur une situation : là on se voit, on se dit les choses, et on se rend compte que notre objectif dans l’échange ne ressort pas toujours…
J’ai appris à demander clairement, à dire “j’aimerais”, et j’ai compris que l’on ne devrait pas employer le “est-ce que…”. Mon petit mémo (que l’on reçoit à la fin de la formation), je l’ai tout le temps dans l’agenda, je le donne à plusieurs de mes collaborateurs pour les aider.
Parler avec bienveillance, de manière directe et explicite
VM : Vous êtes dans un métier réputé difficile : comment faîtes-vous pour attirer des talents, recruter et garder ces talents ?
VJ : Je fais beaucoup de communication, notamment sur les réseaux sociaux. J’ai, je pense, cette compétence de savoir échanger avec les personnes, et au sein du groupe il y a beaucoup de jeunes qui parlent de l’entreprise à l’extérieur : cela fait la meilleure publicité. Le bouche-à-oreille est notre meilleure communication. Et on doit encore s’améliorer, par exemple sur l’accueil, sur le respect de la personne humaine. Par exemple émettre des critiques sur quelqu’un, sans le dire directement à la personne concernée. La formation nous pose la question “comment vous aimeriez que l’on vous parle ?” Justement avec bienveillance, de manière directe, explicite, comme cela est mis en avant par les formateurs de la Discipline Interactifs.
VM : Effectivement, savoir dire les choses, ça s’apprend. De sorte qu’on ose plus souvent dire ce que l’on a besoin ou envie de dire à ses interlocuteurs. En quelques mots, comment résumerais-tu la valeur que la Discipline Interactifs a pour toi, pour ton entreprise, tes équipes ?
VJ : Gagner du temps avec le respect de la personne humaine, et en même temps aimer les gens. Parce qu’on dit les choses avec vérité, quand on exprime son besoin, dans le travail, dans un couple, en apprenant à se connaître mieux, on apprend à mieux s’entourer de personnes compétentes et complémentaires à nous, et ça nous apprend à mieux communiquer, en disant clairement “j’ai besoin de telle chose”. Avec en face la réponse claire de la personne : “je peux te le donner, ou pas.” Cela, c’est gagner du temps. Et en apprenant à se connaître, on apprend à s’entourer de personnes qui ne sont pas nocives ou toxiques, en tout cas pour moi.
VM : Merci beaucoup Valérie pour ce moment d’échange.
VJ : Merci également, j’ai passé un super moment à échanger avec toi. Comme je dis souvent avec ce proverbe africain que j’ai revisité : “L’homme seul va plus vite, avec la femme il va plus loin”. Ce proverbe correspond bien à nos deux entreprises.